Zone de libre-échange des Amériques  - ZLEA

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Public
FTAA.soc/civ/21/Rev.1
Le 8 mai 2002

Original :
anglais

ZLEA – COMITÉ DES REPRÉSENTANTS GOUVERNEMENTAUX SUR LA PARTICIPATION DE
LA SOCIÉTÉ CIVILE

MÉMOIRE PRÉSENTÉ EN RÉPONSE À L’INVITATION OUVERTE


Nom Maude Barlow, présidente bénévole
Conseil des Canadiens
Deborah Bourque
Syndicat des travailleurs et travailleurs des postes
Organisme Conseil des Canadiens / Syndicat des travailleurs et travailleuses du Canada
Pays Canada

SOUMISSION AU COMITÉ DES REPRÉSENTANTS GOUVERNEMENTAUX
SUR LA PARTICIPATION DE LA SOCIÉTÉ CIVILE DE LA ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE DES AMÉRIQUES 
PRÉSENTÉE PAR LE CONSEIL DES CANADIENS ET
LE SYNDICAT DES TRAVAILLEURS ET TRAVAILLEUSES DES POSTES

OTTAWA, ONTARIO

AVRIL 2002

Le Conseil des Canadiens et le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP) sont heureux de cette occasion qui leur est offerte de faire valoir leurs opinions devant le Comité des représentants gouvernementaux sur la participation de la société civile de la Zone de libre-échange des Amériques.

Le Conseil des Canadiens est un groupe de citoyens indépendant et apolitique du Canada comptant plus de 100 000 membres et 60 sections régionales dans tout le pays. Le Conseil a pour mission de sensibiliser le public et de promouvoir le débat démocratique sur certaines questions primordiales qui se posent au Canada, à savoir : protéger nos programmes sociaux, promouvoir la justice économique, contribuer au renouveau de la démocratie, affirmer la souveraineté canadienne, préserver notre environnement et proposer d’autres solutions pour remplacer le système de libre-échange calqué sur le modèle des grandes entreprises.

Le STTP est un syndicat canadien comptant 48 000 membres dans les secteurs des communications, des transports et des postes. Il possède plus de 200 sections locales dans tout le pays. La majorité des membres du STTP sont des employés des services postaux publics du Canada, c’est-à-dire de la Société canadienne des postes. Le STTP participe activement à des débats sur des politiques publiques et à des initiatives liées à des accords commerciaux internationaux. Il possède un intérêt direct dans la plainte déposée par United Parcel Service à l'encontre de la Société canadienne des postes dans le cadre de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA).

Tant le Conseil que le STTP se disent très inquiets des projets visant à élargir la portée de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) pour englober 34 pays dans les Amériques et à créer la Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA).

Nous pensons que la ZLEA consolidera et verrouillera le modèle néolibéral de développement qui a érodé l’indépendance de certains pays au sein de l’Amérique latine et ravagé les économies latino-américaines.

Nous pensons également qu’un accord aussi lacunaire que l’ALENA ne devrait pas être étendu. En raison des contraintes de temps et des limites financières rencontrées, nous limiterons en grande partie notre soumission aux inquiétudes que nous entretenons relativement aux propositions d’étendre les sanctions en matière d’investissement de l’ALENA à la ZLEA (avant-projet de l’accord de la ZLEA, chapitre sur les investissements, article 10 Expropriation et indemnisation).

Les disciplines en matière d’investissement de l’ALENA placées dans leur contexte

En 1998, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a abandonné son projet d’établir un accord d’investissement multilatéral (AIM) après que des manifestations publiques eurent été organisées à l’échelle mondiale pour protester contre l’établissement de règles de l’AIM qui obligeraient les gouvernements, par règlement, à préserver les intérêts des sociétés étrangères, même aux dépens des intérêts publics. Malheureusement, l’ALENA, qui a servi de prototype à l’AIM, est actuellement proposé comme modèle, tant pour l’initiative de la Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA) que pour l’Accord sur les mesures concernant les investissements et liées au commerce de l’OMC. Les principes de l’AIM ont également été intégrés dans pratiquement 2 000 traités bilatéraux d’investissement (TBI) discrètement négociés sur une période de plus de vingt ans, la plupart au cours des dernières années. Plus de cent pays ont signé de tels traités.

Le droit à l’application privée

La caractéristique la plus remarquable de ces accords de commerce et d’investissement réside dans les droits inédits qu’ils accordent à des sociétés étrangères. En vertu de l’ALENA, par exemple, les investisseurs privés se voient accorder le droit pratiquement absolu de faire appliquer les dispositions d’un traité auquel ils ne sont pas parties et en vertu duquel ils n’ont aucune obligation.

Les sociétés étrangères estiment que l’exercice de tels droits d’application représente une sérieuse dérogation aux normes du droit commercial international qui permet uniquement aux nations-États d’avoir recours à des procédures de règlement des différends. En conséquence, les puissants mécanismes d’exécution de ces traités internationaux ont été libérés des contraintes diplomatiques, stratégiques et pratiques qui limitent souvent le règlement direct des différends entre États. Lorsqu’un investisseur dépose effectivement une plainte, cette dernière est jugée, non pas par des tribunaux ou des juges nationaux, mais par des tribunaux privés rendant leur décisions en vertu du droit international et en conformité avec les procédures établies pour résoudre des revendications commerciales privées, non des différends portant sur des questions de politiques générales et de droit public. Les tribunaux délibèrent à huis clos et les plaidoyers ainsi que les éléments de preuve sont automatiquement soumis à des ordonnances strictes de confidentialité.

Par conséquent, il n’est pas étonnant que ces traités d’investissement soient devenus des armes servant à attaquer les initiatives mises en œuvre par le gouvernement pour atteindre des objectifs en matière de santé, de protection de l’environnement et autres objectifs de société. Ils ont été invoqués au moins à 27 occasions pour contester :

  • le droit environnemental et le droit sanitaire, notamment des règlements sur la protection des eaux souterraines;
     
  • des règlements sur la gestion des déchets dangereux prescrits par la Convention de Bâle sur le commerce international des matières dangereuses;
     
  • une interdiction sur les exportations d’eau douce et autres mesures de conservation;
     
  • le pouvoir de planification de l’utilisation des terres des gouvernements municipaux;
     
  • les pratiques d’approvisionnement d’une société d’État;
     
  • les verdicts du jury et les jugements de cours d’appel;
     
  • les activités de la Société canadienne des postes pour avoir enfreint des disciplines de l’ALENA qui ne devraient pas, en vertu des règles de l’ALENA, faire l’objet de la moindre plainte d’investisseurs étrangers;
  • Le Canada se trouve désormais impliqué dans un plus grand nombre de plaintes opposant des investisseurs et l’État que le Mexique ou les États-Unis et les deux seules affaires à avoir été conclues ont été résolues en faveur des investisseurs contestants. Dans le cadre d’une troisième affaire, le Canada a abandonné sa défense de règlements concernant des additifs à l'essence neurotoxiques après avoir perdu une première confrontation devant un tribunal spécialisé dans les différends opposant investisseurs et États. Il a accepté dans cette affaire de payer à l’investisseur contestant plus de 19 millions de dollars en coûts.

    Bien établir les droits privés de propriété

    Plusieurs de ces plaintes se fondent sur une clause de l’ALENA, propre à d’autres traités d’investissement, qui interdit au gouvernement de prendre des mesures qui nationalisent ou exproprient, directement ou indirectement, des investissements étrangers, ou de prendre une mesure équivalente de nationalisation ou d’expropriation. Lorsqu’une telle expropriation survient, l’investisseur doit être indemnisé de la pleine valeur marchande de son investissement. Que l’expropriation ait été réalisée à des fins publiques, sans pratiques discriminatoires, et en respectant les voies de droit régulières est sans importance.

    Lorsqu’un tribunal a jugé qu’une petite ville mexicaine avait exproprié l’investissement d’une société américaine de récupération des déchets dangereux en refusant d’autoriser la société à construire un site d’évacuation des déchets dangereux sur un terrain déjà contaminé par de tels déchets, le Mexique a fait appel pour faire annuler la décision. Rejetant l’appel, le juge a déclaré que la règle sur l’expropriation de l’ALENA pouvait avoir une application très générale et inclure un rezonage légitime par une municipalité ou une autre autorité investie du pouvoir de zonage. D'après cette norme, toute mesure gouvernementale diminuant la valeur d’intérêts liés à des investissements étrangers pouvait donner lieu à une plainte par un investisseur.

    Une plainte déposée par UPS contre la Société canadienne des postes, fondée sur un différend opposant un investisseur et un État, se distingue des autres sur certains points très importants car elle fait partie d’une campagne mondiale stratégique visant à étendre les activités de service de messagerie de la société aux dépens des services postaux, de transport de lots et de messagerie du secteur public. La plainte d'UPS repose sur un point essentiel, à savoir que le réseau postal canadien financé par l’État offre à la Société canadienne des postes un avantage indu par rapport aux sociétés de messagerie privées. UPS estime que la Société canadienne des postes subventionne de façon inéquitable ses services concurrentiels de messagerie à l’aide de ce réseau financé par l’État. Toutefois, à une époque où les sociétés d’État et les organismes publics offrent au moins certains services en concurrence avec le secteur privé, cet argument pourrait s’appliquer à pratiquement tous les services du secteur public, de l’approvisionnement en eau aux soins de santé.

    Aussi inacceptables que soient en elles-mêmes ces procédures d’investissement, elles sont encore plus inquiétantes si on les considère du point de vue des principes constitutionnels du Canada. Étant donné notre conviction que les procédures opposant investisseurs et États représentent une grave atteinte à ces principes, nous avons réuni nos forces pour contester la validité de ces procédures de l’ALENA devant les tribunaux. Nous espérons une déclaration de la Cour supérieure de justice de l’Ontario en vertu de laquelle les procédures opposant investisseurs et États de l’ALENA, et les lois canadiennes qui les mettent en œuvre, seront déclarée nulles et non avenues.

    Nous affirmons qu’en établissant ces procédures extraordinaires, le gouvernement fédéral a agi d’une manière qui :

  • i) sape l’indépendance des tribunaux canadiens en déléguant indûment le pouvoir de statuer sur des affaires qui leur sont réservées par la s. 96 de la Loi constitutionnelle;
     
  • ii) enfreint et refuse d’accorder les droits et libertés garantis par la s. 7 (justice fondamentale) et la s. 15 (égalité) de la Charte canadienne des droits et libertés ainsi que par la s. 2e) (audition impartiale) de la Déclaration canadienne des droits;
     
  • iii) outrepasse le pouvoir de conclure des traités du gouvernement en vertu du droit canadien et du droit international;
     
  • iv) viole des principes constitutionnels fondamentaux, notamment la primauté du droit, la démocratie, le constitutionnalisme et le fédéralisme.
  • Droits des sociétés et droits de la personne

    Les incidences des disciplines en matière d’investissement de l’ALENA sur les droits codifiés par la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de l’homme et plusieurs conventions et déclarations internationales sont tout aussi problématiques.

    Il est aisé de trouver des contradictions flagrantes entre les accords internationaux concernant les droits de la personne et ceux établis en vue de protéger les investisseurs étrangers. Par exemple, l’article 2 de la Charte des droits et devoirs économiques des États des Nations Unies (1974) stipule que les lois régissant la nationalisation, l’expropriation et l’indemnisation seront celles de l’État procédant à la nationalisation et non celles du droit international. Par contre, l’ALENA stipule que ces différends seront résolus en conformité avec le droit international, non national, ce qui démontre la nette incompatibilité de l’Accord avec cette Convention des Nations Unies.

    Nous estimons que le gouvernement fédéral du Canada s’est préoccupé outre mesure de protéger les intérêts de puissantes sociétés internationales, pour lesquelles il a accepté de brader sa souveraineté, et même l’indépendance de ses tribunaux. Toutefois, lorsqu’il s’agit de protéger les droits de la personne, l’environnement, la biodiversité, ou les droits des travailleurs, ce même gouvernement a maintes fois exprimé ses inquiétudes en matière de souveraineté afin de neutraliser la mise en place de mesures efficaces de protection à l’échelle internationale.

    Cette discrimination systématique en faveur des intérêts d’un groupe de sociétés riches et influentes représente une violation, non seulement des garanties constitutionnelles canadiennes, mais également des engagements pris par le Canada pour être partie aux conventions internationales sur les droits de la personne, l’environnement et le travail.

    Le Conseil et le STTP estiment qu’il existe un besoin urgent de consolider les institutions et accords internationaux, tels que ceux établis en vertu de l’Organisation internationale du Travail, de traités environnementaux ainsi que de conventions sur les droits de la personne, pour obliger les gouvernements à enfin respecter ces engagements internationaux.

    Pour toutes les raisons décrites dans la présente soumission, le Conseil des Canadiens et le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes formulent les recommandations suivantes :

    Recommandation no 1 : Les clauses sur l’investissement de l’ALENA devraient être abrogées, et non étendues à la ZLEA.

    Recommandation no 2 : Les gouvernements devraient renforcer de manière substantielle les accords internationaux sur les droits de la personne, les droits en matière d’environnement et les droits dans le domaine du travail avant d’entamer toute négociation d’un accord commercial.

    Recommandation no 3 : Les gouvernements devraient revoir la structure de l’Organisation internationale du Travail (OIT), dans le but de lui donner plus de ressources et plus de pouvoir, et notamment de la doter d’un mécanisme d’exécution qui lui permette d’obliger ses membres à respecter les normes internationales régissant les droits de la personne et les droits dans le domaine du travail.

    SCFP 1979


    En raison d’une erreur involontaire, dans le document FTAA.soc/civ/21, la case Pays qui indique Jamaïque devrait indiquer Canada.
    Cette nouvelle version du document a été publiée afin de prendre en compte cette modification.

                   

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